Witold Gombrowicz

Éxilé en Argentine

Invité pour une croisière sur le transatlantique Chrobry, Witold Gombrowicz arrive en Argentine le 20 août 1939. La guerre éclate, il décide de rester à Buenos Aires et y demeurera 23 ans. L'œuvre de Gombrowicz, interdite en Pologne par les nazis puis par les communistes, tomba dans un relatif oubli jusqu'en 1957 où la censure fut levée provisoirement.

En 1948, il écrit un drame Le mariage, puis commence un roman intitulé Trans-Atlantique, qu'il écrit pendant ses heures de travail au Banco Polaco.

« Une nuit que je rentrais à pied de Cabalito, je me mis, par jeu, à ordonner sur mode granguignolesque les souvenirs de mes premiers jours à Buenos Aires et, ce faisant, par la force du passé même, je me suis senti anachronique, drapé d'un style archaïque, empêtré dans une sclérose presque préhistorique et cela m'a tellement réjoui que je me suis mis à écrire quelque chose qui devait constituer mes mémoires préhistoriques de cette époque […] Mais naturellement – comme toujours – l’œuvre, une fois entamée, s'est échappée et a commencé à s'écrire d'elle-même […] »

Après avoir reçu en 1953 les exemplaires polonais du Mariage et de Trans-Atlantique, Gombrowicz se lance dans la rédaction de son Journal qu'il achèvera à Vence en 1969.

En mai 1955, Witold Gombrowicz quitte le Banco Polaco. Il a décidé de se consacrer entièrement à l’écriture. Il subsiste grâce à une petite bourse du Comité américain pour l’Europe libre et à des cours de philosophie donnés à des amies polonaises. Il écrira des textes entre 1959 et 1961, publiés après sa mort sous le titre Souvenirs de Pologne et Pérégrinations argentines.

gorbodessin de Roland Topor pour l'édition espagnole de La pornographieGombrowicz se consacre à l'écriture de La Pornographie, roman situé en Pologne pendant la guerre, dans une propriété de la noblesse terrienne.

« Eh bien, dans La Pornographie, je révèle un autre but de l'homme, sans doute plus secret et moins légal : son besoin de Non-plénitude… d'Imperfection… d'Infériorité… de Jeunesse…

La Pornographie. Deux messieurs d’un certain âge tiraillés vers le bas... vers la chair, les sens, la jeunesse... En écrivant ce livre je me sentais mal à l’aise. Mais le « physique » m’était nécessaire, indispensable même, comme contrepoids à la métaphysique. D’ailleurs la métaphysique appelle la chair. Je ne crois pas en une philosophie non érotique. Je ne fais pas confiance à la pensée quand elle se délivre du sexe. »

Journal

cosmosCosmos, dessin de Nicolas Barthelemy

Il est nominé en France pour le prix du meilleur écrivain étranger en 1959. Finalement, c’est Lawrence Durell qui l’emportera. Les éditeurs italiens, américains, anglais et allemands s’intéressent à son œuvre.

Witold Gombrowicz s'attaque à Cosmos, son cinquième roman, en 1961, et l'achève à Vence en 1964. Il paraîtra en Pologne en 1986. Witold Gombrowicz voyait dans Cosmos un roman sur la formation de la réalité, une sorte de récit policier.

« Cosmos pour moi, c’est noir, d’abord noir, quelque chose comme un courant noir, bouillonnant, plein de tourbillons, d’arrêts, d’eaux stagnantes, une eau noire chargée de mille résidus et que l’homme fixe en essayant de la déchiffrer, de comprendre, de lier ce qu’il voit en une certaine totalité. Le noir, la terreur et la nuit. La nuit traversée d’une passion violente, d’un amour dénaturé. »

Testament