À la rencontre d'une des nouvelles voix du roman francophone : Sophie Divry, une jeune auteure engagée dans la vie comme en littérature. À la découverte de son univers, de ses goûts et de ses influences.
Sommaire :
- Une femme engagée...
- ... en littérature
- Une littérature qui dissèque le quotidien
- Parmi ses influences
Une femme engagée…
Originaire de Montpellier, Sophie Divry est née en 1979.
Journaliste, elle travaille dans la presse indépendante, principalement au journal La Décroissance, mensuel de référence en matière de critique de la société consumériste.
Ex-syndicaliste, elle s'engage en politique et défend ses convictions en se faisant la porte-parole d’Audaces aux municipales de 2008 à Lyon, sa ville d'adoption.
Après sept ans d'engagement militant, la romancière délaisse la politique pour se consacrer à l'écriture et organiser son existence autour de la littérature.
… en littérature
C'est par la poésie que Sophie Divry est venue à la littérature. Du 16e au 20e siècle, nombreux sont les poètes et écrivains qui ont marqué son parcours : Louise Labé, poétesse, femme libre et rebelle, Racine, Proust et George Sand (dont elle aimerait faire découvrir l'Histoire de ma vie), Boris Vian, sans oublier deux écrivains moins connus en France, Raymond Federman et la romancière brésilienne Clarice Lispector. Elle a comme point commun avec cette dernière des récits mettant en scène des femmes émergeant brutalement de leur quotidien confortable mais sans saveur.
Une littérature qui dissèque le quotidien
Pour Sophie Divry, l'écriture relève d'une libido intérieure et consiste essentiellement à « chercher, fouiner, approfondir... ». Dès 2010, elle met en application cette introspection dans La cote 400, où l'on partage le quotidien monotone d'une bibliothécaire aigrie. Ce premier roman, traduit en cinq langues, obtient un succès d'estime, succès reconduit en 2013 avec Journal d'un recommencement où la jeune narratrice pose son regard sur l’église catholique.
C'est avec son troisième roman La condition pavillonnaire, Mention spéciale du prix Wepler en 2014, que Sophie Divry obtient la reconnaissance de la critique et des lecteurs pour la justesse de son observation d'un univers petit-bourgeois à travers la vie d'une mère de famille bien rangée. De ce récit, la romancière est ressortie avec la volonté de changer radicalement de registre.
C'est chose faite en 2015 dans son dernier roman Quand le diable sortit de la salle de bain où son envie de se faire plaisir et de s'amuser est partagée avec les lecteurs.
Le mariage de la fantaisie et de l'humour fonctionne pour aborder un sujet qui ne prête pourtant pas à rire, l'histoire d'une trentenaire mise à l'épreuve de la pauvreté. L'auteure fait le choix d'aborder des thèmes peu présents dans la littérature française contemporaine : les minimas sociaux, la faim, l'humiliation.
Entre la bibliothécaire azimutée de La Cote 400, la très bovarysante M. A. (Emma !) de La Condition pavillonnaire et la Sophie chômeuse de Quand le diable sortit de la salle de bain, le même fil tisse les romans de Sophie Divry et se teinte d'une fine critique des conventions sociales et du modèle de consommation. Ses personnages ont en commun de faire l’expérience d’une réduction du champ de leurs possibles.
Parmi ses influences :
Edgar Hilsenrath
Certains auteurs reprennent inlassablement la même histoire, s’épuisent à en disséquer chaque facette, à en pénétrer le mystère sous tous les angles possibles, tous aussi nécessaires qu’irrémédiablement insuffisants. Edgar Hilsenrath est au contraire de ceux dont aucun des livres ne se ressemble, ni ne ressemble vraiment à d’autres d’ailleurs. Et pourtant, au-delà d’un style froidement fébrile qu’on reconnaît bien d’un livre à l’autre, parfois burlesque et épique, dérangeant dans tous les cas, c’est aussi toujours un peu la même question qui se repose. C’est toujours le même fantôme qui vient obséder de son intranquillité éternelle chacun des tomes de ce qui, rétrospectivement, se déploie comme une vaste « chronique du monde juif d’un bout à l’autre de la destruction ».
© Slate.fr
Gilbert Sorrentino
Une exubérante noirceur. Romancier, poète et critique, Gilbert Sorrentino, né et mort à Brooklyn (1929-2006), fut l'une des figures majeures sur la scène littéraire new-yorkaise dès les années soixante. Son œuvre ne compte pas moins de trente titres (dont cinq sont actuellement en traduction française), parmi lesquels Mulligan Stew Salmigondis, parodie de métafiction qui consacra sa réputation en 1979.
© Presses universitaires de Rennes
Raymond Federman
Raymond Federman (Montrouge 1928 - San Diego 2009) a été ouvrier, champion de natation, joueur professionnel, saxophoniste, parachutiste (pendant la guerre de Corée) puis professeur à l’université de Buffalo (état de New York), spécialiste de Beckett. Il a écrit aussi bien en anglais qu’en français et a notamment publié (en France) : Amer Eldorado (2003), La Fourrure de ma tante Rachel (2003, 2009), Quitte ou double (2004), Mon corps en neuf parties (2004), Surfiction (2006)...
© Éditions Leo Scheer
Hubert Selby
Hubert Selby Jr. est surtout connu en France grâce à l’adaptation au cinéma de deux de ses livres : Last Exit to Brooklyn et Requiem for a dream. Son roman Le Démon, dont on dit qu’il a très fortement influencé Bret Easton Ellis pour la rédaction d’American Psycho, compte également un certain nombre de fans chez nous. Tous ces ouvrages sont liés entre eux par la thématique de la violence, de l’abjection, des obsessions de toutes sortes, sexuelles notamment. Pourtant, ceux qui ont rencontré Hubert Selby Jr. racontent la gentillesse, la douceur, la sainteté de cet homme qui a connu dans sa vie des épreuves physiques et morales d’une intensité insoutenable. D’où la question, point de départ de ce documentaire : comment ce saint a-t-il pu écrire des livres si apparemment abjects ? C’est ainsi que l’on découvre un puritain rigoureux derrière l’ancien junky, un enragé qui tente de contenir dans son ventre la part effrayante de lui-même et, indéniablement, un artiste majeur du XXe siècle.
© France Culture
Christa Wolf
Née en 1929, Christa Wolf vit à partir de 1945 dans la zone d’occupation soviétique qui devient en 1949 la République démocratique allemande. Son premier roman, Le Ciel partagé (1963), la met d’emblée au tout premier rang de la jeune littérature est-allemande. Avec ses œuvres suivantes, et notamment Christa T. (1968), Trames d’enfance (1976), Aucun lieu. Nulle part (1979) et Cassandre (1983), Christa Wolf est reconnue comme l’un des écrivains majeurs de ce temps. Elle reçoit de très nombreux prix, dont le Prix Büchner en 1980, et est traduite dans plus de vingt langues. Christa Wolf vit à Berlin.
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